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Dopage et échecs ? par Au***ti****12894 le
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Comme les posts concernant ce sujet ont été effacés sur le sujet « Grenke Chess Classic », je me permets d'ouvrir un nouveau sujet concernant uniquement cela, ça permettra de voir un peu l'avis de tout le monde.
Étude sur les effets des nootropics sur les performances cognitives lors de parties d'échecs (mars 2017):
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28119083
En français pour les non-initiés à la langue de Shakespeare:
https://francais.medscape.com/voirarticle/3603083
https://www.addictaide.fr/dopage-cognitif-et-jeu-dechecs-les-resultats-instructifs-dune-etude-publiee-dans-european-neuropsychopharmacology/
Points essentiels sur cette étude:
- Réalisée en double blind donc les sujets ne savaient pas quand ils étaient sous placebo ou sous stimulant.
- La plupart des joueurs sous Methylphenidate (Ritaline) ou sous Modafinil perdait plus souvent leurs parties au temps car plus attentifs et concentrés.
- MAIS si on enlève les parties perdues au temps, les résultats montrent un progrès significatif entre les performances sous stimulants et sous placebo.
- Point noir de l'étude: elle a été réalisée en cadence semi-rapide. Une étude sur une cadence plus lente permettrait de faire chuter le taux de perte au temps et de valider l'hypothèse selon laquelle les stimulants seraient susceptibles de hausser notre niveau de jeu.
Ainsi, dans le cadre de la pratique échiquéenne, on ne parlera pas de dopage physique mais plutôt de dopage cognitif.
Pensez-vous donc que le dopage aux échecs est quelque chose de réel ou selon vous, est-ce que ceci n'a rien de significatif ?
Enfin, question polémique: Si les produits stimulants sont considérés comme du dopage, devrait-on interdire la caféine dans la pratique échiquéenne, sachant que cette molécule est l'un des nootropics les plus puissants qui soient (c'est un puissant stimulant, pour simplifier) ?
P.S: Pour l'étude montrée, il est connu que le Modafinil (et ses dérivés comme l'Adrafinil, Hydrafinil ou le Fluoromodafinil) en plus d'être stimulant (comme la caféine) a des effets (positifs) sur la mémoire.
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Je pense qu'un produit stimulant peut avoir une action sur le long terme(en cas de tournoi sur 7 jours par exemple)...
Mais le pire des produits dopants est l'utilisation du smartphone...bien sûr sans se faire "gauler"!!!
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"Les auteurs ont testé, chez 39 joueurs de niveau moyen de club (ELO moyen = 1600)"
Soit la même différence avec des joueurs de top niveau qu'entre un enfant qui apprend à écrire et un prix nobel de littérature.
En me dopant moi, on peut, sans doute, significativement, augmenter mes performances cognitives, car il y a de la marge.
En dopant une personne ayant déjà des capacités de concentration exceptionnelles, c'est loin d'être sûr.
D'autre part, augmenter le niveau d'attention des joueurs est utile pour les aider à mieux faire en partie ce qu'ils ont appris par ailleurs.
Je ne crois pas que les insuccès de Aronian ou les succès de Carlsen, par exemple, soient uniquement liés à cela.
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Julo -> Sauf que là, ça a été testé sur des joueurs « moyens » contre une machine calibrée sur leur Élo respectif donc bon, on aurait pu faire ça sur des 2000, ça aurait été sûrement la même chose, la comparaison entre enfant qui apprend à écrire et un prix Nobel de littérature n'a rien de pertinent ici (puis je ne suis pas sûr qu'on aurait pu réunir beaucoup de 2500+ voulant participer à cette expérience).
Là, tu sous-entends que les meilleurs se dopent, ce n'était pas mon propos. Mais c'est certain que chez le top niveau, la différence sous stimulants / sans doit être assez minime mais elle doit exister et sera à l'avantage du stimulé (à niveau égal, bien sûr).
Renan -> Oui, je pense aussi que sur les tournois à cadence lente avec des rondes qui s'enchaînent, la différence doit être assez significative. Il faudrait une étude là-dessus même si je pense déjà savoir ce qu'il en ressortira. Le Modafinil pourrait facilement aider à éviter la gaffe qui vient après 5 heures de réflexions intenses par exemple en gardant l'esprit assez frais.
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Bonne idée de reposter un sujet séparé, ça va permettre de continuer la discussion de manière apaisée :-)
J'ai lu le papier entier et pas seulement l'abstract, si ça intéresse des gens je peux vous envoyer le PDF si vous me donnez une adresse email. Le mécanisme qu'il montre c'est que ces trois produits n'améliorent pas l'efficacité de la réflexion mais font réfléchir plus à des moments clés. Avec un avantage: augmentation de la qualité de jeu à ces moments clés. Et un inconvénient: plus de zeitnot et de défaites au temps.
En revanche je ne suis pas d'accord avec ça: "Une étude sur une cadence plus lente permettrait de faire chuter le taux de perte au temps et de valider l'hypothèse selon laquelle les stimulants seraient susceptibles de hausser notre niveau de jeu."
On n'en sait rien. L'arbitrage "profondeur de réflexion / gestion du temps" est très important aux échecs, y compris en parties lentes. Si c'est pour nous transformer tous en Sacha Grischuk, pas sûr que ça améliore nos résultats (juste notre tendance à gâcher en zeitnot des positions supérieures).
Cela étant, ce sujet est important et il faut continuer à étudier ces possibilités de dopage cognitif, bien sûr.
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@ AutisticPerson
Je dois vraiment avoir du mal à faire passer mes pensées.
C'est tout à fait l'inverse, je suis convaincu que les meilleurs ne se dopent pas.
Si ma comparaison n'a rien de pertinent, les conclusions sur le dopage, donc pour les joueurs de haut niveau (si toi ou moi on se dope, je crois que tout le monde s'en fout, et à raison) sur la base d'une étude menée sur 39 joueurs faibles ne l'est pas plus.
Pour le genre de joueurs concernés par l'étude, je suis convaincu que l'essentiel des défaites sont causées par des boulettes tactiques élémentaires en 2 ou 3 coups max, événements qui n'arrivent jamais (statistiquement parlant) entre joueurs du top.
Effectivement les joueurs faibles commettants ces bévues peuvent voir leurs résultats sensiblement améliorés par l'augmentation de leurs capacités d'attention.
Puisque la cause de leurs défaites, c'est justement cette difficulté à maintenir un niveau d'attention minimal.
Dans une population qui ne souffre pas ou presque pas de ce défaut, je ne vois pas ce que cette amélioration peut lui amener de significatif.
Pour faire simple, les 2 populations n'ont pas les mêmes caractéristiques (je maintiens que la seule ressemblance c'est l'activité pratiquée, pas la pratique) donc il est peu sérieux d'extrapoler des conclusions mêmes avérées de l'une sur l'autre.
Les anabolisants font se déplacer plus vite Ben Johnson, mais pas sa voiture.
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Raspoutilf -> Oui, vu comme ça, d'accord. Mais je ne suis pas certain que le temps de réflexion reste linéaire même si on augmente la cadence. Cependant, cela démontre quand même une hausse du niveau de jeu en restant alerte aux moments-clefs comme tu dis. Et c'est surtout cette partie là qui est intéressante.
Encore une fois, à voir avec d'autres études. Malheureusement, c'est une chose tellement rare de tester cela aux échecs qu'on doit se contenter de ça (pour le moment). Tester d'autres stimulants, d'autres cadences pourrait apporter un résultat plus précis.
Ensuite, si il y a les stimulants pour la partie, mais en amont, prendre du Pramiracetam, du PRL-8-53 ou de l'Huperzine A qui boostent significativement la mémoire peut aussi apporter un avantage non négligeable pour l'apprentissage.
Julio -> Je pense que tu as mal compris cette étude. Si cette étude avait été menée avec des joueurs contre une machine calibrée autrement qu'à leur niveau, cela n'aurait eu aucune valeur. Là, les joueurs se battent contre une machine ayant exactement le même niveau qu'eux, donc que ce soit un joueur de 1500 Élo ou 2000, cela ne change rien.
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Pas de dopage à haut niveau pour la quasi-totalité des joueurs: on n'imagine pas un Gelfand, un Grischuk ou un Granda-Zuniga se faire des piquouses pour jouer 20 points au-dessus de leur niveau, et accessoirement se déglinguer la santé à long terme. Pour eux, c'est le jeu qui les dope, non l'inverse.
Après, qu'il y ait des tentations (la camera sous la perruque, droidfish dans les toilettes) entre grosso modo 1800 et 2200, intervalle où la passion pour le jeu, l'investissement consentit parfois important et des résultats jugés insuffisants, oui, sans doute. Mais ce sont des pratiques marginales de quelques joueurs croyant transitoirement à leur martingale.
Bref, zéro réalité sociale du dopage dans le milieu professionnel, et quasi-absence chez les amateurs. Rien à voir avec les pratiques sportives où la dimension physique est première : soulever des poids, faire avancer une bicyclette, se rentrer dans le chou sur un terrain de rugby, etc.
La danse du papillon restera l'exception : la tentation générée par l'arrivée de modules subitement plus forts que les meilleurs joueurs a produit cet épisode navrant.
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Encore une fois Ducouloir, on ne parl pas de dopage à haut niveau, on parle juste des effets quantitativement, rien de plus, via des articles scientifiques. Il faudrait aussi que tu différencies le dopage PHYSIQUE du dopage COGNITIF.
Par contre, un point sur lequel on ne va pas être d'accord mais je vais mettre ça sur le compte de la méconnaissance: les nootropics ne déglinguent pas forcément la santé (tout dépend de ce qu'on prend, certaines substances ne sont pas beaucoup étudiées donc impossible d'être sûr et certain de ne pas avoir un effet en particulier).
C'est comme si je disais que la caféine déglinguait la santé. À dose normale, tout va bien, il ne faut juste pas en abuser (tout est poison, c'est la dose qui fait le poison comme disait Paracelse), c'est valable avec toute substance.
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@ Autistic
Il me prend pour un c** en plus ;)
Non, j'ai très bien compris.
Que des 1200 jouent contre des ordinateurs valant 1200 ou des 2000 contre des ordinateurs jouant contre des 2000, ça n'a rien à voir avec ce que font des 2700 entre eux ou contre un ordinateur calibré pour valoir ce niveau (déjà ça, c'est assez drôle comme postulat sur la valeur du module).
Quand je fais une ballade en forêt et que je pique une tête à la piscine, je ne crois pas que ça ait grand chose de comparable avec les meilleurs performers mondiaux en ironman.
Comparer des joueurs à 1600 qui jouent et des joueurs à 2700 qui jouent c'est comparer des échantillons incomparables.
Ils ne font pas la même chose avec leur cerveaux.
L'étude parle bien de molécules augmentant la capacité de concentration, carence très importante chez les faibles joueurs, et quasi inexistante chez les joueurs plus forts.
Si je prends des médicaments pour soigner l'hyper tension, mais que je n'en souffre pas, ma santé ne va pas s'améliorer, par contre le même traitement pour un hyper-tendu va lui être très bénéfique.
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Non, je ne te prends pas pour un c.. et là encore, ton exemple est très à côté de ce que l'étude a voulu démontrer.
Là, tu parles d'une maladie associée à un traitement, ce qui n'est pas du tout le cas dans ce test puisqu'on a une étude en double blind: placebo et stimulant sans savoir quand est-ce qu'on est sous placebo et quand est-ce qu'on est sous stimulant (pour éviter l'effet placebo, ça va de soi).
Le niveau de jeu n'est pas une maladie que l'on traite via stimulants. Ça aurait pu être fait sur d'autres domaines demandant une certaine réflexion, le résultat aurait été le même.
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"ça a été testé sur des joueurs « moyens » contre une machine"
Contre une machine ça invalide tout test.
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@ Autistic
Si je comprends bien le titre de ton sujet : "Dopage et échecs" on va parler des joueurs de haut niveau, car, si mon voisin se shoote à l'EPO pour aller faire son excursion dominicale, osef, par contre, s'il participe au Tour de France, c'est pas la même chose.
De plus, dans le contexte des échecs (i.e. la manne financière extraordinaire à disposition des joueurs) seul le top niveau est concerné par le "dopage".
De l'étude présentée, on peut donc attendre une généralisation à la population susceptible de dopage, à savoir les pros, parce que, comme pour mon voisin, le dopage cognitif des 1600, osef.
De là, j'émets 2 réserves, les mêmes depuis le début et l'étude, amha, ne les lève pas, voire n'est pas en mesure de les lever :
1) L'échantillon test est trop différent de la cible réelle de l'étude. Donc les conclusions obtenues, même avec une méthodologie scientifique rigoureuse, ne sont pas généralisables à la population cible.
2) Les effets attendus et observés sur la population test ne sont pas forcément à attendre sur la population cible.
Donc suite à la lecture de cette étude, à la question : puis-je conclure qu'il est possible de se doper (donc pour les joueurs de très haut niveau, sinon le terme de dopage n'est pas pertinent) ?
Je réponds : je ne sais pas car elle ne propose pas d'élément pertinent pour conclure.
(Je ne dis pas que la réponse à la question est négative, juste que l'étude ne sert à rien)
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Par contre je voulais savoir si les produits cités dans ce post sont interdits, c'est à dire considérés comme dopants (gurosan, modafinil etc...)...en cas de contrôle même dans un petit tournoi cela peut faire mal!!!
Cf, ce contrôle antidopage lors d'un match de rugby dans une petite Division....
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Bon, à la réflexion, j'ai plein de points complémentaires :-) Qui apporteront j'espère des éléments sur différents points soulevés:
1/ Impact des produits sur le temps de réflexion
C'est pour moi le résultat le plus impressionnant de l'étude. Le groupe placebo a réfléchi en moyenne 436s (sur les 900s disponibles), le groupe caféine 530s, le groupe methylphenidate 547s et le groupe modafinil 552s. La différence se fait dès le début de la partie, mais se creuse surtout en milieu de jeu: les joueurs "dopés" prennent plus de temps pour réfléchir quand c'est compliqué.
Deux réflexions de ma part:
- D'une part, l'impact des produits est énorme: +25% de temps de réflexion en moyenne, c'est assez dingue.
- D'autre part, je trouve que ces joueurs jouent en moyenne très vite: il faudrait voir le contenu des parties pour mieux comprendre (nulles rapides? gains ou défaites rapides sur gaffes?), mais un groupe placebo qui utilise en moyenne 7 grosses minutes sur 15, contre un adversaire de force égale, c'est troublant. La moyenne ELO des 40 gars étant de 1670, et la cadence étant un peu inhabituelle, ni blitz ni semi-rapide, j'ai tendance à penser qu'ils n'étaient pas très efficients dans la gestion de leur réflexion et que les substances ont "corrigé" cela. Je reparlerai de cette question du niveau plus tard, ça rejoint ce que soulève Julo.
2/ Impact sur le score
Même sans corrections à l'analyse, on voit "quelque chose": le groupe placebo marque 51% des points (la bécane était bien paramétrée!), les dopés entre 54% et 55%. Mais l'écart n'est pas statistiquement significatif, c'est-à-dire qu'on n'a pas une certitude assez forte qu'il n'est pas dû au hasard.
Les pertes au temps ou à cause du temps (ce point n'est pas clair... où met-on la limite?) augmentent significativement: dans le placebo, il y en a 30 sur 779 parties, dans les "dopés" entre 70 sur 760 (caféine) et 104 sur 757 (methylphenidate).
Au final, on a une "histoire" assez crédible: les produits font réfléchir plus les joueurs, ce qui augmente pas mal la qualité de leur jeu en milieu de jeu, mais les met en plus en zeitnot et donc atténue le gain en score que la qualité accrue de leur jeu supposerait.
3/ Quid à une autre cadence?
Je suis d'accord avec Autistic sur un point: il est possible que l'effet néfaste d'un temps de réflexion accru se dissipe en parties longues, et que les dopés aient la capacité de réfléchir plus aux moments clés, donc d'augmenter leur qualité de jeu, sans pour autant pâtir des mêmes crises de temps qu'en 2x15mn.
Néanmoins, l'augmentation de la qualité de jeu en fonction du temps de réflexion n'est pas forcément linéaire non plus! Si tu prends 1mn au lieu de 20s sur un coup en parties rapides, surtout à 1700ELO, il y a des chances que tu vois beaucoup plus de choses et évites des erreurs flagrantes. En revanche, prendre 30mn au lieu de 10mn en parties lentes n'induit pas forcément une hausse de la qualité du coup joué. Même Carlsen dit qu'il ne joue pas mieux quand il réfléchit très longtemps à un coup, et à 1700 il y a des chances que tu sois plus dans de l'indécision que dans de l'approfondissement.
Donc s'il est crédible que le "dopage" ait moins de conséquences néfastes en parties longues, il est possible aussi qu'il ait moins d'avantages. On n'en sait rien, c'est juste qu'on ne peut pas déduire de ce qui se passe en rapide ce qui se passerait en classique.
4/ Quid du niveau des joueurs?
Le fait que les joueurs jouent contre des machines calibrées selon leur force n'élimine pas l'argument, et je trouve le point de Julo pertinent. Si comme le disent les auteurs l'augmentation de la force de jeu ne vient pas d'un cerveau qui fonctionne mieux mais d'une meilleure capacité à allouer du temps aux décisions cruciales, alors il est crédible que les forts joueurs bénéficient moins de ce "dopage" s'ils ont déjà la capacité d'allouer du temps aux décisions cruciales (et c'est sans doute une caractéristique des forts joueurs). Intuitivement, tu as envie de bourrer de modafinil les gamins de 8 ans qui blitzent leurs parties classiques, mais pas forcément d'en proposer à Carlsen.
C'est une des faiblesses de l'étude: leur échantillon de joueurs est tout petit, ils compensent en leur faisant jouer beaucoup de parties, du coup ils ont beaucoup d'observations, mais leur échantillon ne leur permet pas de regarder l'hétérogénéité de l'impact: ça aurait été drôlement intéressant de voir si l'impact est le même à 1400, 2000 ou 2600.
Les auteurs disent que les trois substances sont bénéfiques quelque soit le niveau pour les joueurs qui ne tombent pas en zeitnot, et potentiellement néfastes pour les autres. Mais ils n'argumentent pas sur le "de tout niveau", c'est dommage, c'est un point important.
5/ Quid de l'adversaire?
Un autre point non soulevé (mais c'est le propre des lab experiments de passer ça sous silence): quelle certitude a-t-on que ce qui est vrai pour une étude en lab sur des bécanes est vrai dans un tournoi de la vraie vie? J'ai avancé l'hypothèse du niveau moyen des joueurs pour expliquer des temps de réflexion assez bas, mais c'est possible aussi qu'ils n'en aient pas eu grand chose à faire, qu'ils soient venus prendre leurs 400 balles (le défraiement offert), et qu'ils aient blitzé comme on blitze au café du coin. Et que le "dopage" ait juste transformé ces joueurs insouciants en joueurs en mode "vraie compète". Mais du coup, on n'a aucune certitude sur l'impact des médocs sur des joueurs qui sont déjà en mode "vraie compète", motivés et concentrés par le contexte du tournoi.
Ce n'est bien sûr qu'une hypothèse gratuite de ma part, mais il faut quand même garder ça en tête: la vérité du labo n'est pas forcément celle de la vraie vie.
6/ Quid des effets secondaires?
Un passage du papier a retenu mon attention, c'est celui sur les effets secondaires: tu as eu beaucoup plus de gens se plaignant de maux de tête ou de difficultés à dormir dans les groupes test que dans le placébo... Ce qui pose quand même la question de la viabilité de ce "dopage" sur une période un peu longue, ne serait-ce qu'à l'échelle d'un tournoi d'une semaine.
7/ Quid de l'usage pour l'entrainement?
Si l'article soulève plein de questions intéressantes, il ne me convainc pas de la possibilité d'un dopage cognitif efficace aux échecs, tant les qualités requises sont diverses et parfois opposées. En revanche, je trouve plus crédible qu'il puisse favoriser l'entrainement, si des substances permettent d'encaisser des séances de travail plus lourdes et/ou de mémoriser mieux ce qu'on étudie. Je chercherais plus dans cette direction là que dans l'augmentation de la performance à instant T... et je laisserais les buveurs de café tranquilles!
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Le mandofinil ? C'est le nom d'une perruque ?
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Magnifique post Raspoutilf qui résume à la fois les points intéressants de cette étude mais aussi ses failles (aucune étude n'est parfaite), n'est-ce pas.
Pour le point 4, il aurait été plus intéressant d'avoir un groupe plus homogène, totalement d'accord. Mais bon, on ne va pas se plaindre, ce genre d'études est tellement rare dans le domaine des échecs.
Pour le point 5, c'est une chose intéressante à prendre en compte effectivement mais on rentrerait plus dans le subjectif individuel, ce qui n'est pas le but de cette étude.
Point 6. Je suis apte à parler des effets secondaires de toutes ces substances puisque je les ai déjà expérimentées dans d'autres conditions.
Le modafinil est la molécule de l'éveil, très excitante et effectivement, elle provoque souvent des mots de tête (un ami se plaignait souvent des maux de têtes comme effets indésirables de la prise de Modafinil). Et pour dormir, comme c'est la molécule de l'éveil... Pas besoin de faire un dessin (problème qui n'apparaît pas dans la version fluorée qui m'a tant accompagné depuis janvier lors de révisions passionnées mais là n'est pas le sujet).
Pour ce qui est du Methylphenidate, c'est encore pire. C'est le truc qu'on donne pour traiter les signes d'hyper-activité donc quand c'est quelqu'un de normal qui en prend, une très petite dose peut très vite le booster.
Point 7. Là encore, je suis apte à en parler puisque j'expérimente des substances diverses et variées (cela dans la légalité la plus absolue, je le précise, aucun de mes produits est interdit par l'ANSM). Et là, certains produits peuvent en terme de mémoire ou de rétention d'informations être un gros plus dans un cycle d'apprentissage. Quand certains produits peuvent apporter +30% de rétention d'informations à long terme (à condition de ne pas avoir un estomac trop fragile), ce n'est plus du domaine du négligeable.
De mon point de vue, oui, on pourrait considérer ça comme du « dopage » (personnellement, tenter d'améliorer ses capacités intellectuelles au delà des limites « innées », est-ce répréhensible ?). Mais alors là, je souhaite bonne chance pour prouver que les résultats présents sont des conséquences d'un dopage antérieur en amont.
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Très bon Ducouloir, j'y ai pensé aussi.
Sinon cette étude, et sa présentation, ici, me fait penser aux pages info sportives en ligne où le titre très accrocheur n'est pas du tout justifié à la lecture de l'article.
Ici, l'étude démontre (même si on peut émettre des réserves sur la méthodologie expérimentale) que des joueurs avec de faibles niveaux de concentration peuvent améliorer leurs résultats aux échecs en absorbant des molécules améliorant cette compétence.
Comme je l'ai dit, le terme de dopage me semble impropre pour qualifier ce comportement s'il était pratiqué par ces mêmes personnes en compétition.
Mes quelques réserves sur la méthodologie sont les suivantes :
Un module parametré pour jouer à 1700
Ça veut dire quoi ?
On le fait mettre en prise des pièces 1 coup sur 3, on le fait jouer des positions inférieures?
S'il gagne des parties au temps dans des poubelles, parce que lui est programmé pour jouer sans tomber, en fait il vaut 1500 mais il joue vite?
39 joueurs
La population test est ridiculement faible, même en jouant 20 parties.
D'autre part, l'attention ou la capacité de concentration, n'est pas une constante chez l'être humain.
Si elle a un niveau donné au début d'une activité la nécessitant (Typiquement en jouant aux échecs), elle va d'abord augmenter à mesure que le joueur "entre dans la partie" puis va se stabiliser à son niveau maximal, et enfin va décroître avec la fatigue.
Ce phénomène a été observé et analysé sur les joueurs d'échecs professionnels (les drosophiles de la psychologie cognitive), mais aussi dans des secteurs professionnels autres tel que le contrôle aérien.
Quand les defaites des humains ont elles lieu dans leurs séries de parties ?
Si cette distribution temporelle de l'attention est caractéristique des experts, elle ne l'est pas de l'amateur qui va avoir beaucoup de mal à conserver son attention à un haut niveau et à ne pas être perturbé par les stimuli extérieurs.
Il va donc vraisemblablement profiter pleinement de l'amélioration chimique, et pas forcément l'expert.
Je ne suis pas spécialiste en psychologie ou en neurologie, mais je ne serais pas surpris si un test par imagerie medicale fait pour comparer les zones cérébrales activées par des joueurs faibles et par des joueurs experts montrait des différences significatives.
J'ai parfois eu la même impression qu'entre des individus utilisant leur langue maternelle et d'autres une langue étrangère même excellemment maîtrisée.
Bref, cette étude me semble maladroitement menée.
Le phénomène de l'attention a déjà été maintes fois observé et analysé.
Les observations de Krogius, pour son application aux échecs, même si elles datent d'une cinquantaine d'années sont très pertinentes.
J'ai consulté, lorsque j'étais moi même étudiant, en BU, certains ouvrages de psychologie cognitive qui abordaient ce sujet, mais je ne saurais plus les citer.
Le sujet est globalement peu et/ou mal abordé par le manque de compréhension et/ou connaissance de la population étudiée (les joueurs d'échecs de haut niveau) par les auteurs des études.
Je ne sais pas dans quel domaine tu etudies, mais si j'étais scientifiquement concerné par cette étude, je ne m'en servirai pas pour démontrer autre chose que ses conclusions expérimentales strictes.
Sauf si j'appartiens au laboratoire pharmaceutique cherchant à commercialiser ces molécules.
Bonne continuation.
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Julo ->
Pour le module, il a été programmé pour jouer en ayant 6 minutes à la pendule et pour ne pas jouer « automatiquement » (notamment dans l'ouverture) entre chaque coup pour ne pas trop stresser l'adversaire humain (facteur psychologique).
Population faible, oui. Mais encore une fois, c'est l'une des seules études scientifiques de ce genre concernant les échecs qu'on peut trouver (en tout cas, dans mes recherches récentes, je n'ai rien trouvé de semblable) donc on s'en contente pour ce que c'est en attendant de voir une autre expérience de ce type portée à plus grande échelle.
La capacité n'est pas une constante, c'est un fait indéniable. Mais je ne comprends pas vraiment où tu veux en venir sur ce point. Justement, ce test a été fait pour voir si ces substances pouvaient accroître le niveau d'attention / vigilance des joueurs durant une partie, ce qui semble être effectivement le cas, pas de savoir si le joueur va gagner 400 points Élo en terme de maîtrise échiquéenne suite à cela. Mes excuses si on s'est mal compris sur ce point.
Je crois que définitivement, tu juges cette étude pour ce qu'elle n'est pas: à savoir une étude de la psychologie du joueur d'échecs. Les conclusions expérimentales strictes justement me semblent prometteuses et ne demandent qu'à être confirmées dans d'autres études ultérieures.
« Comme je l'ai dit, le terme de dopage me semble impropre pour qualifier ce comportement s'il était pratiqué par ces mêmes personnes en compétition. »
Et pourtant, selon le règlement de la FIDE qui se base pour la partie dopage sur la liste de l'AMA, ça en est complètement.
Et non, je n'ai rien à vendre, cette étude rassemble juste deux domaines que j'adore (nootropics et échecs), rien de plus, rien de moins.
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Juste une précision : il est impossible de faire jouer un module à un niveau de 1600, 2000 ou autre. Un module calcule : point barre. Les simulations de niveaux se contentent de demander au module de choisir à une certaine fréquence (d'autant plus importante qu'on veut baisser son niveau) des coups de second, troisième voire dernier ordre ce qui donne en pratique un jeu chaotique et tout sauf représentatif d'un jeu humain.
Je vous laisse le reste, hein. ;-)
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"Et non, je n'ai rien à vendre, cette étude rassemble juste deux domaines que j'adore (nootropics et échecs), rien de plus, rien de moins."
Je ne te soupçonne pas le moins du monde.
Cependant, il apparait que mes propos, que j'essaie d'avoir les plus clairs possibles (véridique!) ne sont, soit pas compris, soit pas partagés.
Je crois que nous atteignons les limites de l'échange constructif via un forum.
Je serai ravi d'échanger plus concrètement et directement, mais c'est impossible via ce média.
Je t'ai donc présenté, sincèrement, mon opinion sur cette étude, et je te réitère, sans aucun second degré, mes vœux de bonne continuation.
Et comme dirait l'autre :
"Je vous laisse le reste, hein. ;-) "
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