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Combien d'années faut il pour bien jouer aux échecs par Meteore le
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Le jeu d'echecs sous sa forme actuelle bénéficie déjà d'une grande ancienneté. Visiblement il y a 400 ou 500 ans les règles étaient déjà bien établies sous leur forme moderne.
Ce que je trouve très surprenant c'est l'extraordinaire lenteur des progrès pour arriver (enfin) aujourd'hui à un jeu presque parfait pratiqué par les meilleurs joueurs contemporains.
Je lis en ce moment un très intéressant livre "on the origin of good moves" qui aborde ce sujet. Un des exemples frappant est issue de la pratique d'un des tous meilleurs joueurs au monde de la première moitié du 19ème siècle, Alexander McDonnell qui joua en 1834 l'équivalent d'un championnat du monde contre Louis de la Bourdonnais. L'auteur explique que McDonnell adorait une manœuvre consistant en plein milieu de jeu à faire passer son roi de e1 à f2 puis g3 et de là à lui faire jouer un rôle actif. Aujourd'hui cela semblerait absurde, mais si un des plus forts joueurs du monde y croyait, c'est qu'il restait en 1834 énormément de choses à découvrir !
Je trouve amusant que l'être humain puisse inventer de toute pièce un jeu et qu'il faille aussi longtemps pour le maitriser. Ce n est pas du tout la même chose que les mathématiques car ces dernières ne sont pas une invention humaine et qu'il semble logique que les humains ne la maitrise jamais parfaitement
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C'est intéressant de dire, en passant, que les mathématiques ne sont pas une invention humaine.
Les mathématiques sont-ils le langage de l'univers ou sont-ils le meilleur essai humain pour le décrire ?
Il y a de quoi écrire quelques posts.
Et peut-être pas les plus inutiles du forum de ces derniers temps :-)
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''Aujourd'hui cela semblerait absurde''. Pourquoi ? C'est marrant. Déjà, quand nous étions jeunes, dans les années 70, mes frères et moi, nous jouions des lignes comme ça. Mais on ne trouve des parties que 15 à 20 ans plus tard, dans les bases de données :
1.e4 e6 2.d4 d5 3.Cd2 Cf6 4.e5 Cfd7 5.f4 c5 6.c3 Cc6 7.Cdf3 Db6 8.h4 cxd4 9.cxd4 Fb4+ 10.Rf2 f6 11.Rg3 0-0. Et là il faut jouer 12.Ch3 et pas 12.Fd3.
Bien sûr, il s'agissait de la transposition de l'idée de McDonnell qui réussissait à transformer les Siciliennes de La Bourdonnais en Françaises !
McDonnell,A - De Labourdonnais,L [B21]
London m1 London (16), 1834
1.e4 c5 2.f4 e6 3.Nf3 Nc6 4.c3 d5 5.e5 f6 6.Na3 Nh6 7.Nc2 Qb6 8.d4 Bd7 9.Ne3 cxd4 10.cxd4 Bb4+ 11.Kf2 0-0 12.Kg3 fxe5 13.fxe5 Rac8 14.h4 Rxf3+ 15.gxf3 Nxd4 16.Bd3 Rf8 17.f4 Bc5 18.Rf1 Bb5 19.Bxb5 Qxb5 20.Kh3 Ne2 21.Ng2 Nf5 22.Kh2 Neg3 23.Rf3 Ne4 24.Qf1 Qe8 25.b4 Bd4 26.Rb1 Qh5 27.Rbb3 Rc8 28.Be3 Rc2 29.Kg1 Nxe3 30.Rfxe3 Nd2 31.Qd3 Rc1+ 32.Kh2 Nf1+ 33.Kh3 Nxe3 34.Nxe3 Qf3+ 35.Kh2 Rh1# 0-1
En imaginant cette ligne ( jouée plusieurs fois ) il a en fait créé les bases de la théorie dans la Tarrasch de la Française avec f4.
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@Meteore : Je ne sais plus si c'était avec vous ou avec quelqu'un d'autre. Mais je me rappelle d'une autre discussion sur le match De Labourdonnais-Mc Donnell. Je disais que ces joueurs étaient déjà de grands stratèges, à l'opposé de leur image, à mon avis erronée, de joueurs ''romantiques''.
Bon...désolé, pour cette digression.
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Les Echecs sont peut-être une forme encore plus subtile des mathématiques, trop subtile pour notre esprit limité ! Et le Jeu d'Echecs est-il vraiment une invention humaine ? Peut-être, nous a-t-il été légué, comme le monolithe du début de 2001, l'Odyssé de l'espace, aux australopithèques, à l'aube de l'humanité.
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@Chemtov : ce que je veux signifier c'est que la sécurité du roi est un élément majeur (et consensuel ) de la théorie actuelle, ce qui n'était semble t il pas le cas dans la conception de certains champions de la première moitié du 19ème siècle.....
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Un poème de Joseph Méry (1797-1866) relate une partie d’échecs disputée en 1834 entre le Français Louis-Charles Mahé de La Bourdonnais et l’Irlandais Alexander McDonnell
Le roi blanc a donné le signal des combats.
Le pion de sa dame avance et fait deux pas,(d4)
Le voisin aussitôt parcourt le même espace ; (...d5)
Le pion du fou blanc de la dame se place,
Audacieux gambit, près de son frère blanc . (c4)
Et percé par le noir, il tombe sur le flanc. (...dxc4)
Le pion du roi blanc, qu’un noble zèle embrase,
Se sépare de lui, ne franchit qu’une case, (e3)
Le pion du roi noir, beaucoup plus hasardeux,
Affrontant son voisin, soudain en franchit deux. (...e5)
Le fou du roi d’ivoire alors brise sa chaîne,
Et faisant quatre sauts, prend le pion d’ébène ; (Fxc4)
Le soldat du roi noir enlève le pion
Que la dame d’ivoire avait pour champion. (...exd4)
Le pion du roi blanc remplit la même tâche. (exd4)
L’écuyer du roi more à l’instant se détache
Et se cabre, la bride abattue à son cou,
À la deuxième case au-devant de son fou. (...Cf6)
.../...
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@Meteore: Je pense qu'au contraire Mc Donnel a compris que le roi pouvait trouver là une certaine sécurité dans d'autres types de positions, différentes de celle du roque. C'était un précurseur dans cette ligne avec cette chaîne de pion. D'ailleurs, plus tard, même Karpov a adopté cette variante sans roque où le roi gagne souvent en finale. Par exemple, sa célèbre partie contre Ljubo:
1.e4 e6 2.d4 d5 3.Nd2 Nf6 4.e5 Nfd7 5.c3 c5 6.f4 Nc6 7.Ndf3 Qb6 8.g3 a5 9.a4 cxd4 10.cxd4 Bb4+ 11.Kf2 g5 12.h3 f6 13.Be3 0-0 14.Rc1 Rf7 15.Rh2 Bf8 16.Qd2 Qb4 17.Qxb4 axb4 18.b3 Na5 19.Rb1 gxf4 20.gxf4 Bh6 21.Bd3 b6 22.Rg2+ Kh8 23.Ne2 Ba6 24.Bxa6 Rxa6 25.f5 Bxe3+ 26.Kxe3 b5 27.axb5 Rb6 28.Rbg1 h5 29.Nf4 fxe5 30.Ng6+ Kh7 31.Ng5+ Kg7 32.Nxe5 Nxe5 33.Nxf7+ Kxf7 34.dxe5 1-0
Un jour, dans cette ligne ( Open de Metz, 1990), mon roi est monté jusqu'en g4! Les blancs gagnent ( diagramme )
@Reyes : ça aussi, c'est une ligne très profonde. J'ai fait des stages entiers sur cette structure de pion isolé contre abc et fgh, à la fois positionnelle et tactique, pouvant provenir d'une demi douzaine d'ouvertures.
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@Chemtov ; avec tout le respect que je vous dois pour votre belle carrière et votre zélo qui est beaucoup plus haut que le miens et de loin ...je trouve que les coups et le plan dans cette partie :
McDonnell,A - De Labourdonnais,L [B21]
London m1 London (16), 1834
1.e4 c5 2.f4 e6 3.Nf3 Nc6 4.c3 d5 5.e5 f6 6.Na3 Nh6 7.Nc2 Qb6 8.d4 Bd7 9.Ne3 cxd4 10.cxd4 Bb4+ 11.Kf2 0-0 12.Kg3 fxe5 13.fxe5 Rac8 14.h4 Rxf3+ 15.gxf3 Nxd4 16.Bd3 Rf8 17.f4 Bc5 18.Rf1 Bb5 19.Bxb5 Qxb5 20.Kh3 Ne2 21.Ng2 Nf5 22.Kh2 Neg3 23.Rf3 Ne4 24.Qf1 Qe8 25.b4 Bd4 26.Rb1 Qh5 27.Rbb3 Rc8 28.Be3 Rc2 29.Kg1 Nxe3 30.Rfxe3 Nd2 31.Qd3 Rc1+ 32.Kh2 Nf1+ 33.Kh3 Nxe3 34.Nxe3 Qf3+ 35.Kh2 Rh1# 0-1 sont quand même assez enfantin je trouve et 14...Txf3 c'est quasiment fini si on garde son sang froid...
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Enfantin ? Je ne trouve pas, enfin ça dépend des enfants. D'abord je suis impressionné par la modernité de Labourdonnais (f6,Ch6), et je me rappelle de certaines parties de Vaganian jouant la Française dans les années 1990 et plantant ce même type de combinaisons, à des GM de haut niveau qui eux, avaient lus pas mal de trucs.
Il y a des joueurs ou des époques qui ne m'impressionent pas trop en niveau de jeu -les années 1950 par exemple-mais ce que faisaient en particulier Labourdonnais en 1830, Morphy en 1855, Capablanca en 1920 me semble extraordinaire, même si avec nos connaissances actuelles certains choses semblent évidentes à un joueur de club bien formé.
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Oh...que de précautions...( Ma belle carrière et mon zélo n'ont rien à voir ici. Je connais quelques abrutis qui ont de bons zelos mais qui ne comprennent pas grand chose aux Echecs et, inversement, des gars vraiment intéressants qui ne parviennent pas à dépasser 1900 ). Non, c'est en bon lecteur, rat de bibliothèque, que j'ose énoncer quelques idées sur ces gars du début du XIXème siècle.
Bon...alors...Txf3, trivial... Oui, l'idée est basique et McDonnel l'attendait évidemment. Mais quant à dire c'est quasiment fini, là vous me faîtes sourire. Regardez déjà, sept coups (!) plus tard 21.a4 à la place de 21.Cg2.
Mais de toute manière, je ne veux pas défendre le ''niveau'' de McDonnel. Simplement, je constate que certaines manoeuvres et constructions ont été revendiquées presque cent ans plus tard par Nimzowitsch ( Fd3-c2 avant de jouer d2-d4 ) ou même par des joueurs actuels ( le barrage a3-b3 ).
Et certaines parties de ce match pourraient facilement être mélangées avec des parties jouées 150 ans plus tard sans qu'on puisse les resituer dans le temps.
Par exemple: 1.e4 e6 2.d4 d5 3.Nd2 Nf6 4.e5 Nfd7 5.f4 c5 6.c3 Nc6 7.Ndf3 Qa5 8.Kf2 Be7 9.Bd3 Qb6 10.Ne2 f6 11.exf6 Bxf6 12.Kg3 cxd4 13.cxd4 0-0 14.Re1 e5 15.fxe5 Ndxe5 16.dxe5 Bh4+ 17.Kxh4 Rxf3 18.Rf1 Qb4+ 19.Bf4 Qe7+ 20.Bg5 Qe6 21.Bf5 Rxf5 22.Nf4 Qxe5 23.Qg4 Rf7 24.Qh5 Ne7 25.g4 Ng6+ 26.Kg3 Bd7 27.Rae1 Qd6 28.Bh6 Raf8 0-1
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Le message était en réponse à Tonnaire. Je n'avais pas vu la référence à Vaganian...
Plus je regarde ces parties, plus je regrette de ne les avoir vues quand j'ai commencé à étudier la Française ( avec les blancs ). Mais on considérait alors ( dans mon milieu ) que ces joueurs passaient au second plan.
Et trente ou quarante ans plus tard, j'ai aussi découvert l'intéressant article ( déjà mentionné dans un autre fil ) de Razuvajev, dans un des Yussupov/Dvoretzky, qui s'appelle ''Vous aviez raison, M.Labourdonnais !'', comparant aussi des parties d'époque avec d'autres de Timman, Huebner ou Vaganian.
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Je rajouterais Damiano, Greco, Philidor, ou encore Paulsen pour les fondations des échecs après 1850.
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Avant 1850 pour les trois premiers et après pour Paulsen.
Oui, c'est marrant de penser qu'il y a à peu près 200 ans entre Greco et McDonnel et encore 200 ans entre McDonnel et nous. Pour en revenir à l'évolution du jeu et au sujet du post de Meteore ( le livre de Hendriks ).
En fait, ce qu'on remarque c'est qu'il est important d'écrire, d'analyser, de commenter et de publier. Si McDonnel avait expliqué pourquoi il jouait ces grandes chaînes de pions pour contrer la Sicilienne, transposant ainsi dans des Françaises Tarrasch ( qui n'existaient pas encore ! ), s'il avait expliqué les manoeuvres Ca3-c2-e3, le pourquoi des pions en a3-b3 et du développement Fd3-c2 avant Nimzowitsch, s'il avait présenté sa conception de la sécurité du roi en f2, avant Karpov, il serait peut-être passé pour un joueur positionnel et aurait figuré davantage dans les manuels d'échecs.
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Louis Paulsen — Leipzig 1877 : https://www.europe-echecs.com/art/louis-paulsen-leipzig-1877-6095.html
Louis Paulsen (15 janvier 1833 - 18 août 1891) : https://www.europe-echecs.com/art/louis-paulsen-15-janvier-1833-18-aout-1891-6063.html
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Très belle partie du champion français je trouve....un des grands prédécesseurs de MVL , avec un style assez similaire je trouve
Son Txf3 est très sympathique à regarder et en plus c'est un vrai sacrifice de qualité...il le fait instinctivement sans pouvoir par le calcul démontrer un mat ou une récupération du matériel.
Aujourd'hui ce serait plus facile car on sait qu'un roi affaibli cela vaut du matériel.. . Je pense tout de même que le positionnement en g3 d un roi en milieu de jeu, même si dans certains cas particuliers cela peut être justifié, n'est pas recommandé
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Le problème du roi, c'est celui de la solidité de la chaîne de pion qui, elle-même, s'évalue par la rapidité et la justesse du placement des pièces. Cela forme un tout. C'est toute une variante très complexe. En fait, dans la Tarrasch, la lenteur de la construction de la chaîne crée un retard de développement. Alors, c'est toute la variante qui est peut-être discutable. Car placer le roi en g1, dans la ligne de mire de la dame noire est souvent une très mauvaise idée. On a découvert que la place la plus sure est g2, en passant parfois par f1. Mais entre temps on a testé aussi g3, puis on y est revenu 150 ans plus tard ! Pour ma part, dans cette variante, mon roi a souvent fini en...e3 !
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Et quid du Re2! dans la sicilienne des 4 cavaliers après Cxc6 bxc e5 Cd5 Ce4 Dc7 f4 Db6 c4! Fb4+ Re2. L'importance de la sécurité du roi est un bon principe général, mais la position dicte les meilleurs coups et parfois ces coups vont à l'encontre de ces principes.
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Oui, mais la vraie référence, liée à ces parties de McDonnell c'est tout simplement celle de Nimzowitsch (75 ans plus tard). Avec la variante d'avance de la Française. Dans tous les cas, la poussée e4-e5 doit servir à la ''mise à l'étroit de l'aile-roi noire'' (Nimzo). Et la migration du roi blanc en trois temps par Rf1, g3 et Rg2 ne pose aucun problème à Nimzowitsch car le jeu noir à l'aile-roi n'est pas menaçant. Mais là, dans les positions de MacDonnel qui ressemblent plus à des Tarrasch (avec f4), les noirs ont trouvé du jeu avec f6 car les blancs ont consommé trop de temps. Et souvent Rg3 s'explique (par rapport à g3-Fg2) car les blancs veulent garder un pion en g2 pour protéger le cavalier f3, face à la menace thématique TxCf3. Comme dit précédemment, dommage que McDonnell ne l'ait pas formulé par écrit, 75 ans avant Nimzowitsch. Ce qui est aussi intéressant et particulier dans ces Françaises avec f4, par rapport à d'autres ouvertures où le roi est déroqué, c'est que, une fois le jeu calmé (avec l'échange des dames) le roi est souvent bien placé pour la finale (au moins pour protéger d4).
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